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Asset Management

Cruel Summer

Les marchés financiers ont déjà récupéré la forte baisse de l’été suite à la publication de données économiques rassurantes. L’occasion de réduire le risque des portefeuilles et de diversifier son exposition actions dans cette phase de fin de cycle. Découvrez le point de vue de Valentin Bissat, Economiste & Stratégiste Senior, dans Le Temps.

Le télescopage de plusieurs narratifs a causé une chute des marchés aussi impressionnante que temporaire durant le mois d’août. Quelques semaines après ces événements, il n’est toujours pas évident d’analyser les causes précises de cette phase de correction des marchés, ni le rôle des différents narratifs. Ce qui est sûr, c’est que des facteurs fondamentaux, techniques et de positionnement des investisseurs ont formé un cocktail particulièrement explosif.

Tout d’abord, la publication des chiffres de l’emploi début août aux États-Unis a joué un rôle majeur. La hausse du taux de chômage a déclenché un signal de récession d’après la règle de Sahm – la différence entre la moyenne du taux de chômage au cours des trois derniers mois et son plus bas niveau des 12 derniers mois – et a entrainé une augmentation de la perception du risque des investisseurs quant aux fondamentaux économiques aux États-Unis. En effet, la marge est étroite entre un scénario d’atterrissage en douceur de l’activité économique (soft landing) qui serait porteuse pour les actifs risqués et un scénario de hard landing qui verrait une forte contraction économique et une baisse des marchés actions. Ainsi, une analyse fine du marché du travail revêt une grande importance pour évaluer la direction future de la consommation américaine et donc, de la croissance.

Cette hypothèse ne permet cependant pas à elle seule d’expliquer cette correction des marchés. En effet, une analyse de la performance des différents secteurs durant la baisse des marchés actions montre que le secteur industriel a surperformé. Ceci n’est pas forcément cohérent avec le narratif sur le ralentissement de la croissance économique étant donné la nature cyclique de ce secteur.

Le débouclement du carry trade sur le yen a également été largement commenté. Plus que la hausse des taux directeurs par la banque centrale japonaise, la véritable surprise est venue des commentaires de son président Ueda lors de la conférence de presse. Ce dernier a en effet affirmé que des hausses consécutives des taux étaient possibles. Cette posture plutôt restrictive (hawkish) de la Banque du Japon signifie que le différentiel de taux d’intérêt entre les États-Unis et le Japon pourrait se réduire davantage qu’anticipé précédemment par les investisseurs. Quelques jours plus tard, le vice-gouverneur japonais est cependant venu adoucir cette prise de position en promettant de ne pas augmenter les taux en cas d’instabilité des marchés financiers. Le yen étant largement utilisé comme monnaie de financement pour l’achat d’actifs à taux d’intérêt plus élevés, le débouclement de
ces positions a été particulièrement brutal. Les dernières données de positionnement des spéculateurs sur les contrats à terme (futures) indiquent que ce débouclement est proche d’être achevé, mais il n’est pas certain que le positionnement des investisseurs à plus long terme ait déjà si rapidement intégré cette nouvelle réalité.

La conséquence de ces deux précédents points a également entrainé un débouclement des positions sur les grandes sociétés technologiques. Après plusieurs semestres de performances stratosphériques, portées par la thématique de l’intelligence artificielle et des résultats extrêmement solides, les investisseurs ont pris une partie de leurs bénéfices sur ce secteur fortement valorisé et dont les résultats sur le deuxième trimestre ont déçu au niveau des revenus et des bénéfices.

Enfin, ces développements se sont produits durant l’été, sur des marchés moins liquides et largement dominés par des stratégies de momentum, de risk parity et où la popularité d’ETF basés sur des stratégies optionnelles ont eu pour effet de réduire artificiellement la volatilité.

Retour au point de départ

La baisse des marchés aura finalement été de courte durée. L’indice de volatilité implicite des
marchés actions américains VIX a réalisé sa plus forte hausse durant une séance avec un pic à plus de 65, avant de clôturer à près de 40, son plus haut niveau depuis octobre 2020. A peine deux semaines plus tard, il était déjà redescendu en-dessous de son niveau d’avant la publication du rapport de l’emploi aux États-Unis, légèrement au-dessus de sa moyenne depuis le début de l’année.

En matière de fondamentaux économiques, les dernières données publiées sont venues faire, en partie, mentir les craintes nées de la hausse du taux de chômage en juillet. Les nouvelles inscriptions hebdomadaires au chômage sont reparties à la baisse, les ventes au détail ont surpris positivement en début de troisième trimestre, et la société Walmart a revu à la hausse ses prévisions de ventes et de bénéfices pour l'ensemble de l'année dans son rapport sur les résultats du deuxième trimestre. Walmart a également indiqué que les dépenses des ménages américains étaient restées robustes même si la consommation semblait se concentrer sur les biens essentiels. Ces chiffres confirment notre scénario de soft landing de l’économie américaine durant le deuxième semestre.

A noter que l’indice S&P 500 equal weight – le même poids est assigné à chaque titre au sein de l’indice – s’échange actuellement à son plus haut niveau historique, ce qui témoigne de l’ampleur de la reprise des marchés actions depuis la phase de correction.

On l’aura compris, le marché de l’emploi américain sera l’un des indicateurs principaux à suivre durant le deuxième semestre étant donné que le consommateur américain a jusqu’à maintenant largement soutenu la croissance économique et évité l’atterrissage brutal de l’activité que beaucoup craignaient. Pour l’instant, la croissance salariale reste en tout cas supérieure à l’inflation, et cette hausse des revenus en termes réels devraient demeurer un facteur de soutien.

Les investisseurs continueront de tester le scénario de soft landing

A l’approche du quatrième trimestre, l’attention se portera de plus en plus sur les élections aux États-Unis. Nous pensons cependant que le cycle économique aura plus d’importance pour les marchés financiers que le cycle électoral.

En septembre, la Réserve fédérale devrait finalement entamer l’assouplissement de sa politique monétaire. Certains des membres les plus conservateurs du Comité de politique monétaire se sont encore récemment positionnés en faveur d’une baisse des taux directeurs à court terme. L’éventualité d’une réduction des taux supérieure à 0.25 point de pourcentage nous paraît peu probable compte tenu des derniers chiffres d’activité rassurants publiés aux États-Unis. Une telle mesure serait par ailleurs interprétée par les investisseurs comme un signal de méfiance vis-à-vis de la croissance et pourrait avoir des effets autoréalisateurs sur le comportement des agents économiques. Nous anticipons trois baisses d’ici à la fin de l’année, d’autant plus que le ralentissement de l’inflation a pour effet de d’augmenter les taux d’intérêt réels et donc de tendre les conditions financières, toute chose étant égale par ailleurs.

A la suite de la reprise des marchés financiers durant la deuxième moitié du mois d’août, les
investisseurs continueront de tester le scénario de soft landing. En effet, la croissance attendue des bénéfices des sociétés est élevée pour le deuxième semestre (+9%) et pour 2025 (+15%). Compte tenu du scénario de fin de cycle économique, les perspectives de hausse des marchés actions sont moindres et un positionnement plus défensif prend tout son sens, que ce soit en matière d’exposition sectorielle ou d’allocation d’actifs. Ainsi, nous privilégions une exposition sur les obligations gouvernementales de la meilleure qualité avec des durations élevées pour bénéficier du cycle de baisse des taux directeurs à venir. Sur les marchés actions, après les fortes performances de ces dernières années, nous recommandons de diversifier l’exposition en dehors des grandes sociétés technologiques en raison de leurs valorisations toujours élevées et de la forte concentration du marché sur ces grosses capitalisations.

Les élections américaines auront malgré tout un impact sur les marchés financiers. Dans l’éventualité d’une élection de Donald Trump, une augmentation massive des tarifs douaniers pourrait être décidée pour les biens en provenance de Chine mais également pour l’ensemble de ses partenaires commerciaux. Des mesures de représailles seraient à attendre avec une augmentation du risque de guerre commerciale au niveau mondial avec des répercussions sur les taux de croissance et d’inflation. Concernant ce dernier point, un plus de l’effet direct, une hausse des prix intermédiaires est attendue ainsi qu’une appréciation du dollar qui renforcerait d’autant plus les prix à l’importation. Sur la croissance, l’impact le plus probable devrait être une baisse de la consommation en raison de la hausse des prix, ainsi qu’une baisse de l’investissement à court terme en raison de l’incertitude des sociétés exposées aux marchés internationaux.

En cas d’élection de Kamala Harris, une attention particulière se portera sur la politique fiscale et sur une éventuelle augmentation des impôts des sociétés. Une telle mesure dépendra également de la majorité à la Chambre des représentants et au Sénat, enjeu également majeur des élections de fin d’année.

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